Je regarde par la fenêtre ...
Le 12 mars 2020 certains d'entre nous, à Rennes, se rencontrent pour évoquer leur ressenti face à la maison Ernest Renan à Tréguier.
Construite à la fin du XVIe siècle, cette maison typique de l'architecture du Trégor est une maison bourgeoise de notables. Sur rue, la façade à pans de bois est de couleurs ocre, marron et rose. En 1992, lors des cérémonies du centenaire d'Ernest Renan, elle reçoit un décor de bois sculpté. Telle quelle et chatoyant dans la lumière, entre les averses, cette élévation satisfait les yeux et les sensations: "J’aimais bien l’extérieur, les couleurs", "Superbe impression, belle façade éclairée…"
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Une façade à pans de bois, colorée
Photographie de Jacqueline - Visite du 5 mars 2020
La façade sur jardin est en pierre de taille. Elle s'élève haute dans des tons gris ocrés et gris bleutés, une grisaille élégante et sévère. Une cour pavée ouvre sur des plantations régulièrement entretenues: "Beau jardin. Belle maison de l'extérieur". Toutefois l'austérité interroge: difficile d'imaginer des enfants courant ici! Certes ces espaces n'ont jamais été des aires de jeux. Au XIXe siècle ils servaient d'arrière-cour aux magasins et échoppes. Depuis ils sont devenus des moments de rêveries solitaires. Pourtant comment imaginer "des enfants (...) avoir des moments de bonheur en famille" ici?
L'intérieur renforce ce sentiment d'immobilité, de temps arrêté. Cette belle bâtisse prolongée de ce beau jardin vert et mélancolique enferme un intérieur studieux, froid et triste. La maison est acquise en 1780 par les grands-parents du savant. Renan la quitte pour toujours à l'âge de 15 ans. Elle devient musée en 1947. La muséographie d'époque est restée. Elle est en soi un patrimoine. Pourtant, datée, elle accentue l'aperception. Le bleu raffiné, le jaune désuet, le parquet reluisant, des objets charmants n'arrivent pas à forcer l'attachement: "L'ambiance manque à l'intérieur", "C'est impersonnel". Cette "maison triste, pas meublée" fait que nous ne sommes "pas à l'aise ...". C'est "comme si la maison n'avait pas d'âme".
Alors c'est à la lecture des cartouches, à l'enthousiasme communicatif de notre guide, à l'attrait d'une citation, à l'éclat d'un objet, à la réminiscence d'un souvenir que les intérêts s'éveillent. Et c'est au final le poétique contraste intérieur, extérieur : "Sentiment désagréable à l'intérieur, je regarde par la fenêtre, l'inspiration me vient" qui insuffle l'adhésion.
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À travers les fenêtres
Photographies de Jacqueline et de Christelle - Visite du 5 mars 2020